It will be fine | Eliza

Ces derniers mois avait été difficile pour la famille de Rebekah. Et pour cause, sa grand-mère avait fermé les yeux. Définitivement. Un choc, une peine infinie pour la jeune femme qui avait vu la vieille dame en rêve la nuit même. Sa Granny avait été comme une seconde mère pour elle, puisqu’elle avait passé énormément de temps avec elle depuis la disparition de sa mère. Son père travaillant beaucoup, la petite Rebekah avait passé la plupart de son temps chez sa grand-mère. Perdre un être cher n’était jamais chose facile, pour personne. D’autant plus que cette femme était aimée dans le quartier, pour sa gentillesse. Un drame pour tout un quartier. Elle lui manquait terriblement, chaque jour. Elle avait bien vécu et maintenant, elle avait le droit au repos. Rebekah savait qu’elle était en paix à présent. Ça la rassurait un peu même si la peine était encore bien présente. Peine que sa cousine Eliza partageait avec elle. La demoiselle était revenue à Seattle pour l’enterrement et elle avait hérité de la maison. Elle vivait dedans pour le moment mais elle comptait la vendre. Heureusement, il y avait quelques travaux à faire pour la remettre à neuf. Personne ne voudrait d’une maison en mauvais état. Rebekah était assez partagée face à la décision de sa cousine. Se débarrasser d’une maison abritant tant de bons souvenirs était un déchirement. Mais en même temps, elle comprenait parfaitement qu’Eliza ne puisse pas supporter de la garder.

En pensant à tout ça, la jeune médium eut envie d’aller rendre visite à sa cousine. Elle savait qu’Eliza était encore très affectée par cette perte récente alors elle voulait l’aider du mieux qu’elle pouvait dans cette épreuve commune. Non pas que Rebekah soit moins triste qu’elle. Loin de là. Mais elle avait un rapport particulier avec la mort. Elle savait et elle sentait que Granny était toujours là, dans sa maison. Contrairement à Eliza qui ne pouvait pas sentir sa présence. Bekah prit une douche bien chaude et se prépara pour sortir en ville acheter des muffins à la boulangerie. Arrivée à destination, elle se gara devant la maison et resta dans sa voiture quelques instants pour regarder la grande bâtisse. Des tas de souvenirs affluaient dans son esprit. De tellement bons souvenirs. Elle avait passé les meilleurs moments de sa vie dans cette demeure. Avec son père, ils avaient passé plus de temps dans cette maison que dans leur propre appartement. Paul avait toujours été proche de sa mère. Souriant faiblement en repensant à tout ça, elle attrapa le sachet de muffins et sortit de sa voiture.

Elle s’avança jusqu’à la porte d’entrée, frappa quelques coups et entra en appelant sa cousine. Pas de réponse. Elle devait certainement être en train de bricoler quelque part. Elle passait son temps à ça dernièrement. Comme si taper du marteau était devenu une sorte d’échappatoire. Rebekah avança dans la maison et rapidement une douce chaleur bienveillante et agréable commença à l’envahir. Granny était bel et bien là. Un sourire aux lèvres, elle parcourut les pièces de la maison jusqu’à la cuisine où elle trouva Eliza des outils à la main. « Salut toi ! » Elle s’avança vers sa sœur de cœur pour la prendre dans ses bras et déposer un bisou sur sa joue. « Je vais finir par croire que tu es née avec un tournevis à la main. » Assura-t-elle en riant légèrement. Elle n’avait jamais vu Eliza bricoler autant que ces dernières semaines. Rebekah s’écarta de sa cousine pour lui montrer le sachet venant de la boulangerie. « A force de travailler autant, je me suis dit que tu devais avoir faim ! J’ai ramené des muffins. » Elle les posa sur le plan de travail et son sac se retrouva déposé dans un coin. « Comment tu vas aujourd’hui ? » Elle espérait mieux que la veille. Mais ce n’était pas certain.

Trouver Eliza avec des outils dans les mains n’avait absolument rien d’étonnant. Elle avait toujours été débrouillarde et bricoleuse, contrairement à Rebekah qui n’était pas du tout manuelle. Ses mains, elle s’en servait pour faire des massages, elle était douée pour ça et c’était déjà pas mal. Alors trouver sa cousine en train de réparer la maison de leur grand-mère qui tombait en ruine était plutôt normal. Le contraire l’aurait même étonnée. C’est dire. Non pas que leur Granny n’avait jamais pris soin de sa maison, mais la demeure n’était pas de première jeunesse non plus, alors forcément, certaines choses tombaient littéralement en lambeaux. Lorsque la brune vit la médium, les deux femmes se serrèrent dans leurs bras pour se saluer. Rebekah déposa les pâtisseries sur le plan de travail sous le regard plein d’envie d’Eliza. « Je savais que tu aurais un petit creux ! » La jeune femme expliqua brièvement ce qu’elle était en train de faire avant d’abandonner la rouquine quelques instants le temps d’aller chercher deux chaises.

Rebekah se mit à rire légèrement face aux excuses de son aînée et s’installa sur l’une des chaises. « T’en fais pas c’est très bien comme ça, et la nostalgie ça a parfois du bon. On a passé tellement de bons moments dans cette maison. » Des moments parfaits avec leur grand-mère. Cette femme avait toujours été un amour et une vieille dame appréciée par ses voisins. Les petites avaient toujours été entre de bonnes mains avec elle. « Pas besoin de vaisselle, t’embête pas ! A ce rythme-là on peut même se faire un pique-nique dans le jardin ! » Ça leur rappellerait le bon vieux temps quand elles jouaient dans le jardin et que leur Granny leur ramenait des sandwiches ou des cookies pour le gouter. Cette maison renfermait tellement de bons souvenirs qui affluaient tous dans l’esprit de la jeune Reynolds.

Dans tous les cas, un détail n’échappait pas à Rebekah. Eliza n’était pas au top de sa forme, même si elle faisait tout pour le cacher. Elle écouta sa cousine lui raconter les évènements de la matinée avec un sourire attendri quand elle évoqua leur grand-mère. Il est vrai que la vieille dame avait toujours été très conservatrice. Il ne serait pas étonnant de retrouver des antiquités dans ses affaires. « Garder les bénéfices des ventes pour restaurer la maison me parait être la meilleure idée oui. Ce serait dommage qu’elle tombe en ruine avec tous les bons souvenirs qu’elle garde. Granny a toujours été attachée à sa maison. Ce ne serait qu’un juste retour des choses que d’en prendre soin. Pour elle. » Cependant, Eliza ne répondit pas à la question de sa cadette. Au lieu de ça, elle la lui retourna. Ce qui arracha une petite moue à la rouquine. « Je vais bien. Je me sens bien chaque fois que je passe le pas de la porte de cette maison. C’est comme si une douce chaleur m’envahissait à chaque fois. » Rebekah n’avait pas besoin de rentrer dans les détails pour expliquer cette sensation qu’elle ressentait. Eliza savait qu’elle était légèrement différente de n’importe qui d’autre, qu’elle pouvait ressentir des choses que personne ne pouvait percevoir. Rebekah ouvrit le sachet de muffins et en récupéra deux, dont un qu’elle tendit à sa cousine. « Je sais à peu près comment va la maison puisque tu m’en as fait un rapide descriptif, mais toi ? Tu n’as pas répondu à ma question. » Eliza n’avait pas réellement besoin d’y répondre avec des mots puisque Bekah pouvait sentir son chagrin et sa tristesse, même si elle la contenait. « Je veux que tu saches que je suis là pour toi. Si tu as besoin de parler, je suis là. Je sais que ça ne va pas, tu n’as pas besoin de me le cacher puisque je le sens. Tu peux te laisser aller avec moi et tu le sais Eliza. » Joignant le geste à la parole, la masseuse posa une main réconfortante sur celle de sa sœur de cœur.

Le deuil n’était jamais quelque chose de facile à vivre ou de simple à appréhender. Chacun le gérait à sa manière. Certains un peu plus facilement que d’autres. Non pas que Rebekah était insensible à la disparition de leur grand-mère. Loin de là. Mais la jeune femme avait une approche de la mort bien différente de Monsieur et Madame tout le monde. Cela ne l’avait pourtant pas empêché de pleurer toutes les larmes de son corps en apprenant la nouvelle. Pour Eliza, cette perte était un combat quotidien. Rebekah en avait parfaitement conscience, elle pouvait ressentir toute la peine qui pesait sur les épaules de sa cousine. Elle savait qu’Eliza n’allait pas bien, malgré son sourire.

Un sourire nostalgique se glissa sur les lèvres de la petite rousse quand son aînée évoqua les meilleurs souvenirs de sa vie dans cette maison. Elle haussa les épaules. « C’est un peu le cas, je pense. Ici, on était comme dans un autre monde, déconnectées de la réalité. Granny a toujours eu le don de nous faire oublier les tracas de la vie par sa simple présence. » Non pas quand elle était enfant, non. Un enfant n’avait pas de souci majeur dans sa vie à part la perte d’un jouet ou ce genre de chose. Mais en grandissant, en entrant dans l’âge adulte, les soucis et notamment les peines de cœur s’accumulaient. Quand Mateo était parti, ce fut Granny qui s’était montrée présente et réconfortante pour Rebekah. Pas facile de dire au revoir à son premier amour et de voir son cœur tomber en miettes. La jeune femme eut un pincement au cœur en repensant à cette période douloureuse de sa vie mais elle balaya bien vite ces souvenirs pour se reconcentrer sur sa cousine.

Le gâteau à la poudre de lune. Ce gâteau mythique de leur grand-mère. Un gâteau qui avait marqué l’esprit d’Eliza. Un gâteau avec un ingrédient spécial dont seule Granny détenait le secret. Rebekah eut un léger rire. « Je ne la connais pas non, mais je suis sûre qu’on peut la trouver. » Il y avait peu de chance que Granny ait écrit cette recette quelque part, mais cela ne coutait rien de chercher. Et puis, d’une manière ou d’une autre, la jeune médium aurait toujours un moyen d’obtenir une réponse pour découvrir quel était cet ingrédient mystère. Cependant, Rebekah changea de sujet pour inciter Eliza à s’ouvrir, à déverser sa peine si elle le souhaitait. Après tout, elle était là pour elle, pour la soutenir, cette femme qu’elle considérait plus comme une sœur que comme une cousine. La mine que la brune arborait ne fit que confirmer ce qu’elle pensait. Elle était au plus mal. N’importe qui pouvait le deviner. Elle n’avait pas besoin de son don d’empathie pour le deviner. Eliza attrapa les mains de sa cousine et Rebekah comprit que ce n’était pas le bon moment pour parler de tout ça. La brunette n’était pas prête. Soit. Un sourire réconfortant se dessina sur les lèvres de la masseuse et elle caressa les paumes d’Eliza avec ses pouces. « Je comprends. Prends le temps qu’il te faut. Quand tu seras prête, je serais là. En attendant, on peut manger des muffins ! » Avec un grand sourire, elle déposa un bisou sur la joue de sa cousine, lâcha ses mains et attrapa les muffins sur la table pour lui en tendre un et en prendre un pour elle. Elle s’appuya contre un buffet et croqua dans le gâteau. « Au fait, tu as revu Dorian ? » Rebekah le connaissait. Enfin, rapidement. Petite, elle avait déjà passé des moments avec lui et Eliza chez Granny. Et comme tout le monde, elle savait qu’il était devenu une star de la musique. Elle l’avait même déjà croisé à plusieurs reprises à Seattle depuis quelques mois. Lui aussi était de retour.