What are you hiding ? | Aaron

Elliott n’avait pas cours aujourd’hui. En même temps, c’était le weekend. Du coup, le jeune homme avait l’intention de profiter de son temps libre pour travailler sur ses vidéos, mais aussi pour simplement se détendre avec un bon livre. Et c’était ce qu’il était en train de faire lorsqu’il entendit Aaron, son frère, passer près de sa chambre. Généralement, Elliott laissait la porte ouverte, du moins, quand il n’était pas en train d’enregistrer une vidéo. Il avait donc constaté le comportement assez étrange d’Aaron depuis quelques jours. En effet, Elliott le voyait souvent passer en mode furtif – ou du moins son frère devait-il croire qu’il était discret et furtif – pour aller chercher quelque chose dans la cuisine avant de retourner dans sa chambre. Le jeune homme s’était imaginé plein de choses, mais surtout une : son frère piquait de la bouffe et allait tout manger en douce dans sa chambre ! Quoiqu’il en soit, il était convaincu que le plus jeune lui cachait quelque chose. Jusqu’à présent, il n’avait rien dit à ce sujet, mais aujourd’hui, il comptait bien lui tirer les vers du nez. Mais pour l’heure, Aaron n’était pas là et Elliott était donc en train de bouquiner tranquillement, s’évadant dans le monde imaginaire décrit dans son livre. Bien évidemment, son genre préféré était le fantastique et ce, depuis presque toujours. Combien de fois avait-il rêvé être l’un des héros de ces livres ? Mais en même temps, quel enfant ne rêvait pas d’être un héros et de vivre des aventures palpitantes dans un monde peuplé de créatures fantastiques ?

Son chat était d’ailleurs avec lui, couché sur le lit, roulé en boule, en train de ronronner doucement. Il était trop mignon. Le jeune homme jeta un coup d’œil vers lui, esquissa un petit sourire et continua sa lecture jusqu’à finalement entendre la porte d’entrée s’ouvrir et se refermer. C’était forcément Aaron. Leurs parents n’étaient pas là, ayant décidé de s’octroyer une petite soirée en amoureux, comme ils le faisaient souvent les weekends. Elliott trouvait ça vraiment trop mignon et il était tellement heureux que ces deux-là se soient trouvés. Lorsque son père s’était remis en couple, il avait été plus que content. Il adorait sa belle-mère, mais surtout son demi-frère, Aaron. Ils étaient inséparables depuis de nombreuses années et le jeune homme avait été un soutien important pour Elliott après son accident. Même maintenant, il restait un vrai pilier dans sa vie. Ils avaient beau ne pas être du même sang, Elliott le considérait comme son frère à part entière. Après tout, contrairement à ce que certains disaient, les liens du sang n’étaient pas tout. On pouvait très bien trouver une famille avec d’autres personnes, des personnes venant d’un tout autre horizon. Bref, ce soir, ils seraient donc seuls. Sans doute Elliott allait-il proposer à Aaron de commander des pizzas ou un truc du genre. Ce serait plus simple pour eux.

Mais revenons-en à nos moutons. Elliott ferma son livre et le posa sur sa table de chevet avant de guetter l’encadrement de sa porte.  « Aaron ? » Il avait intérêt à répondre et à venir. Car le connaissant, il pouvait très bien disparaître dans sa chambre en quatrième vitesse pour planquer il ne savait quoi. « Je te préviens, t’as pas intérêt à aller te cacher dans ta chambre ! » Le chat s’était réveillé et après s’être étiré, avait sauté du lit pour gambader vers Aaron, dans le couloir. « Aaron ! » Sérieux, qu’est-ce qu’il fichait ? Finalement, lorsqu’Elliott aperçut son frère, il ne put s’empêcher de pousser un petit soupir et de le regarder d’un air faussement sévère. « Qu’est-ce que tu trafiques depuis quelques jours ? Et essaie pas de m’embobiner, je suis pas débile ni aveugle ! » Il essayait d’adopter un ton sévère, mais inutile de dire que c’était un peu peine perdue. Elliott était trop gentil pour parler sérieusement de cette façon à son frère. Pourtant, il voulait vraiment savoir ! Il attrapa un coussin et le balança en direction d’Aaron. Attention, il visait plutôt bien ! « Touché ! Et j’arrêterai pas avant que tu m’aies dit ce qui tu fabriques ! Ton comportement est très suspect ! » Oui bon…il allait bien devoir arrêter une fois qu’il serait à court de coussins…donc dans trois lancés. Eh merde.

Enfin la matinée était terminée, horrible, interminable, tu n'avais comme seul hâte que celle de rentrer chez toi et te réfugier auprès de ton frère qui lui avait la chance de ne pas avoir de cours le weekend, oublier auprès de lui l'horreur des semaines passées, oublier les coups, les humiliations, les insultes, alors tu ne t'étais pas attardé longtemps dans le vestiaire, les yeux résolument baissés pour ne pas croiser les siens, pour ne pas lui donner envie d'exprimer une nouvelle fois tout son sadisme, avant de sortir, presque en courant, presque en fuyant. Tu savais que cette situation ne pourrait certainement pas durer éternellement mais tu n'avais pas l'occasion ou plutôt pas le courage d'en parler, chaque fois que tu te retrouvais en huis clos avec un membre de ta famille, chaque fois que tu avais la possibilité de te confier, les mots se formaient dans ta tête, tu savais exactement quoi dire, quoi prononcer pour enfin te faire aider mais ils ne sortaient pas, jamais, remplacés par cet éternel sourire qui illuminait ton visage, qui entretenait l'illusion d'un bonheur factice et leur faisait croire que tout allait bien, le même sourire qui se dessina presque par automatisme alors que tu franchissais le pas de la porte, ton frère t'appelant immédiatement depuis sa chambre alors que ton chat se jetait presque sur toi, t'empêchant d'avancer.
Au bout de quelques longues minutes, trop longues à en juger par l'impatience dans la voix de ton aîné, le chat décida de te laisser en paix et tu pus enfin arriver jusqu'à sa chambre, poussant d'une main la porte déjà entrouverte.

« Désolé Elliott, attaque de chat collant, tu disais ? »

Un air, que tu savais faussement sévère, sur le visage, il commença alors à te demander ce que tu trafiquais depuis quelques jours, soulignant le fait qu'il n'était ni débile, ni aveugle, ce qui eut pour seul effet de te faire arquer un sourcil, dans une expression profondément dubitative, c'était toujours cocasse pour toi d'entendre les personnes à qui tu mentais depuis déjà plus d'un an te dire qu'elles n'étaient pas aveugles, vanter leurs perspicacité car tu savais de quoi il parlait et il ne s'agissait absolument pas de ton secret, du moins pas de ton plus gros secret, celui là était plus léger et tu t'étais donné beaucoup moins de mal pour le dissimuler, toutefois il dut interpréter ton expression comme une moquerie, ce qui n'était pas tout à fait faux, puisque tu n'eus même pas le temps de réfléchir à une réponse convenable qu'un coussin venait de te percuter de plein fouet

« Eh ! »

Tu le ramassas, prêt à le lancer à ton tour sur ton frère lorsque tu te souvins qu'il y avait un PC probablement très coûteux non loin de lui et surtout que tu n'avais absolument mais alors absolument pas sa dextérité et ses talents pour viser.
Vaincu, tu laissas tomber le coussin à tes pieds, levant les mains en signe de reddition.

« Ça va, ça va je déclare forfait, tu triches d'abord t'as un PC derrière toi, je peux même pas contre attaquer »

Il devrait réellement exister une loi interdisant aux grands-frères de lancer une bataille de polochon en terrain miné.

« Je vais te montrer, bouge pas je reviens »

Et en un éclair, comme tu le faisais souvent, tu avais déjà disparu, te précipitant dans ta chambre pour aller chercher le fameux secret, le fameux objet du crime et responsable de ton comportement « très suspect », un tout petit chaton, une petite boule de poil d'à peine quelques mois que tu pris délicatement dans tes bras avant de le ramener à ton frère

« Il s'appelle Witch, je l'ai trouvé en rentrant de l'école il y a quelques jours »

Ou pour être exact, il t'avait trouvé, en train de pleurer et d'envisager de ne même pas rentrer ce soir là, il t'avait adopté bien avant que toi tu ne l'adoptes

« Dis rien aux parents ok ? »

Parce que tu ne savais que trop bien les réactions auxquelles tu allais te heurter, les visages exaspérés, il fallait dire que tu avais tout de même une très forte tendance à ramasser et ramener tous les animaux abandonnés du quartier.